Comme toute unité de reconnaissance, la RSFT se doit de connaître ces bases et de les mettre en pratique le plus fréquemment possible. Un bon camouflage permet d'obtenir des avantages précieux sur une zone de combat.
Sommaire:
1. Les bases
Un bon camouflage dépend avant tout de l'équipement porté et de sa capacité à utiliser la nature à son avantage. Il convient de garder à l'esprit certaines règles, et les militaires de carrière se rappelleront de leur classes en entendant le terme FFOMECBLOT. Ce mot est facile à retenir et est utilisé comme moyen mnémotechnique pour se rappeler les choses les plus importantes à surveiller si vous voulez vous fondre dans l'environnement.
- Fond : il est primordial que ce qui doit être camouflé ne se détache pas du fond (un soldat kaki sur un mur blanc).
- Forme : l'un des buts du camouflage (qu'il s'agisse de la peinture des véhicules et des motifs des uniformes ou des maquillages des soldats) est de gommer les formes les plus visibles car les plus différentes des autres formes visibles dans la nature.
- Ombre : l’ombre accentue la forme, pour être moins visible il est plus indiqué de se situer dans l'ombre.
- Mouvement : le mouvement est très visible.
- Éclat : toute surface brillante ou réfléchissante (verre de montre, de jumelles etc ...), même petite, peut envoyer un éclat lumineux très visible
- Couleur : bleu horizon, vert armée et autres couleurs des différents treillis militaires ont les couleurs les plus neutres et les plus communes dans la nature.
- Bruit : ne pas se faire entendre, et surtout ne pas parler, pour ne pas trahir sa présence.
- Lumière : évidemment la chose la plus visible en pleine nuit en rase campagne (même par nuit de pleine lune). De même que le bout d'une cigarette qui peut se voir à l'œil nu à près d'un kilomètre.
- Odeur : les engins militaires roulent au diesel, odeur difficile à rater en pleine nature, de même pour l'odeur de combustion de poudre. Dans le même ordre d'idée, les soldats sont invités à se soulager dans les feuillées et pas ailleurs.
- Traces : restes de rations, besoins, bidons et douilles vides... De telles traces peuvent renseigner sur l'importance et le type des effectifs qui les ont laissées, il convient de les faire disparaître ou de les minimiser au maximum (la poussière soulevée par des véhicules en mouvement peut se voir de très loin).
Il s'agit ici de résumer l'ensemble des stimuli visuels qui pourraient révéler sa présence auprès de l'ennemi. Chacun de ces éléments est susceptible de donner l'alerte dans le cerveau d'un observateur, dont l’œil sera inconsciemment attiré par toute manifestation de ce type, et donc, l'amèneront à se concentrer sur cette zone jusqu'à ce qu'il puisse démasquer le camouflage mis en œuvre.
2. Avantages tactiques
Les avantages tactiques d'un bon camouflage sont nombreux. Si l'objectif premier est bien sur d'être invisible, invisible oui, mais dans quel but ?
Ces avantages tactiques sont extrêmement important, mais ils doivent toujours être bien préparés. Une position fixe idéale, est une position confortable et où l'on respecte les bases du camouflage (cf 1.), et d’où l'on pourra se déplacer aisément en cas de danger direct, ou afin de gagner une autre position.
3. Les grandes familles de camouflage
Le camouflage briseur de formes
C'est le camouflage qui fut le plus répandu, dans les années 50 à 90. Allant du camouflage Dazzle consistant à dessiner des "brisures" noires sur les bâtiments de combat de la marine US, au très connu camouflage CE de nos soldats français. Sa composition peut varier allant de deux à quatre couleurs et représentant de grandes taches irrégulières sur un tissus de couleur unie (kaki pour le CE).
Ce motif a pour avantage de casser les formes. Très efficace de loin ou contre les reconnaissances aériennes, il a pour défaut d'augmenter le contraste et d'être inefficace à courte distance.
Le camouflage dit "numérique" ou "digital"
Suite à la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis montrèrent un intérêt certain à l'efficacité des tenues de camouflage allemande. A cette époque l'Allemagne avait mise en œuvre un camouflage de type "à pois" (voir plus bas). Les USA firent de nombreux tests durant les années 1970 et s'orientèrent vers des versions à forme carrée ou rectangulaire.
C'est seulement dans les années 2000 que l'armée canadienne mit au point le premier Camouflage numérique, le DCamC (Dessin de camouflage canadien), assisté par informatique, ce camouflage utilise des synthèses d'images satellite ; il reprend l'idée des points des Waffen-SS. Il est officiellement mis en service en 2001 et est décliné en versions aride DCamC régions arides (RA) et arctique.
L'armée US n'est pas en reste et chaque corps développera son propre digital qui sera baptisé MARPAT pour les marines et ARPAT pour l'US Army.
Le camouflage numérique organique, dit également camouflage récursif
C'est un des types de camouflage les moins démocratisé actuellement. Partant du principe qu'un bon camouflage ne peut pas être polyvalent, ni reprendre des motifs géométriques, la société A-TACS à mis au point un procédé hybride basé sur deux éléments prépondérants. D'une part la synthèse d'images photographiques réelles (reprenant la composante du camouflage numérique) mais en traitant celles-ci de manière à ôter toute forme géométrique non naturelle à l'aide d'un algorithme spécifique. La deuxième étant la récursivité du motif, permettant d'atteindre un motif "macro-métrique" à partir de plusieurs motifs "micro-métriques" (au sens non formel du terme).
De ce fait la gamme de camouflage proposée est extrêmement large en fonction de l'environnement dans lequel le porteur évoluera.
Le camouflage "à pois"
En 1937, les Waffen-SS décidèrent, sous l'impulsion d'Heinrich Himmler, de renouer avec le culte du « chasseur/soldat » et de développer un camouflage qui les rapprocherait de la forêt en les distinguant de l'armée régulière. C'est ainsi que Brandt and Schick's développe en décembre 1937 un motif qui rompt avec la technique de brisure. Ce motif est appelé « motif d'arbre », il est composé de petites taches et de formes rappelant les feuilles. Testé sur le champ de bataille, il fut un succès, réduisant de 15 % les engagements adverses. Il fut amélioré, pour obtenir en 1944 le camouflage de type Erbsenmuster ou « petit pois », seulement composé d'un assemblage quadricolore de petites taches rappelant le pelage des félins.
C'est en 1990 que l'armée allemande reconstituée utilise le camouflage de type flecktarn, décliné également en version désert Wüstentarn.
L'armée française envisagea un temps d'utiliser un camouflage de type "à pois" pour en garnir la dotation FELIN, mais ce projet fut abandonné.
Le camouflage hexa-chromique
Comme son nom l'indique, le camouflage hexa-chromique est un type de camo contenant une plus grande variété de teintes (6 au moins). Le représentant le plus courant de ce type de camouflage est sans aucun doute le MultiCam. Développé par la société Crye Precision, il a la particularité d'être tout terrain. Utilisé au départ par certaines forces spéciales de l'United States Special Operations Command, il est très prisé par les employés des sociétés militaires privées en particulier la fameuse Blackwater Worldwide, avec qui Crye Precision a développé une ligne d'équipement. Il reprend et fusionne l'idée du camouflage brisé et du camouflage à pois. Il est en dotation depuis septembre 2009 sur le théâtre extérieur de la Guerre d'Afghanistan pour des forces de l'US Army.
Le dessin du camouflage est suffisamment subtil pour "réfléchir la couleur principale de son environnement: plutôt vert en forêt et plutôt beige en zone désertique. En fait MultiCam tire son efficacité de la façon dont le cerveau et l'œil humain perçoivent les formes et les couleurs. Son dessin unique et ses couleurs fondues rendent le camouflage de plus en plus difficile à distinguer au fur et à mesure que la distance augmente tout en le faisant se fondre dans le paysage environnant. Le système œil/cerveau assimile le camouflage MultiCam à son environnement, ce qui le fait apparaitre plutôt beige, marron ou plutôt verdâtre selon la végétation (ou son absence) autour de lui.
Mais le Multicam n'est pas l'unique représentant de ce type de camo, la firme Bulldog Equipment a quant à elle développée une forme numérique de camouflage hexa-chromique baptisé Mirage.
Le Ghillie Suit
4. Et dans le futur ?
5. Pour conclure
Comme vous l'aurez vu au fil de ce dossier, les applications et les méthodes utilisées pour se dissimuler aux yeux d'autres personnes sont nombreuses. Et je n'ai pas abordé le sujet de l'invisibilité infrarouge ou encore radar, où la aussi les méthodes et applications sont présentes en quantité. De la binoculaire infrarouge au drone de reconnaissances et autres satellites, les techniques de camouflage sont différentes et chaque domaine en aura ses applications propres.
Dans notre cas, ce qui nous intéresse est bien sur l'infanterie et l’œil humain. Du morceau de tissu kaki à la tenue d'invisibilité en méta-matériaux les évolutions et innovations sont multiples, mais le principe lui, est unique. Car en fin de compte il s'agit surtout de berner la faculté de l'adversaire à voir, percevoir ou s'attendre à voir quelque chose. Votre escouade en l’occurrence.
Malgré tout les artifices et toutes les nouvelles technologies et équipements disponibles, la chose la plus fiable est avant tout votre capacité de réflexion. Trouvez l'endroit idéal, celui où les règles de base seront respectées et où l'adversaire ne s'attendra pas à vous voir. Observez et utilisez intelligemment votre environnement, tout ce qui se trouve autour de vous est un outil potentiel de camouflage. Et ne quittez jamais de l'esprit votre but, se camoufler n'est pas le but de votre action mais un moyen de l'atteindre. Il ne doit pas devenir une contrainte, vous bloquant dans vos mouvements ou empêchant une retraite.
Le meilleur des camouflages restera votre ruse et votre ingéniosité.